Le coronavirus a frappé le Groupe Air France-KLM de plein fouet et déjoué toutes ses prévisions financières. Le Groupe se trouve maintenant à la croisée des chemins. Bien qu’il ait récemment connu une importante hausse de passagers, l’un des groupes les plus importants de l’aviation commerciale vacille. Quelles seront les conséquences du coronavirus sur Air France-KLM ? 

Depuis plus de trois mois maintenant, le monde est confronté au coronavirus et, malheureusement, la fin ne semble pas être sur le point d’arriver. Dès le mois de janvier, le secteur du tourisme et de l’aviation ont subi d’importantes pertes financières.

De nombreuses compagnies aériennes ont dû complètement cesser leurs opérations de vol ou du moins immobiliser au sol la majorité de leur flotte. Certains hôtels et voyagistes ont complètement fermé leurs portes et ont été contraints d’envoyer plusieurs employés au chômage partiel.

Récemment, nous avons fait état du retrait du A380 d’Air France et du 747 de KLM, de la réduction de près de 90 % des activités du groupe et, par conséquent, de l’obligation d’envoyer des employés au chômage partiel.

Qu’est-ce que tout cela signifie vraiment pour Air France-KLM ? Il est malheureusement impossible de donner une réponse globale à cette question, mais je voudrais toutefois discuter des impacts que risque d’avoir le coronavirus sur le groupe aérien.

Quelle est la situation d’Air France ?

Comme plusieurs autres compagnies aériennes, Air France fait face à de grandes difficultés. Tout a commencé lorsque la compagnie aérienne a été contrainte d’annuler tous ses vols entre la France et la Chine. Par la suite, la compagnie aérienne a réduit son programme de vol complet, immobilisé au sol tous ses Airbus A380 et recouru au chômage partiel. C’était le début de la fin.

La compagnie aérienne a été particulièrement touchée par l’interdiction d’entrée des ressortissants français dans de nombreux pays ainsi que la fermeture des frontières des États-Unis et du Canada.

Les destinations long-courriers les plus rentables ont par conséquent été supprimés.

Par conséquent, des pertes financières importantes sont prévues pour le premier trimestre de cette année, d’où la raison pour laquelle le sujet des aides d’État a été rapidement abordé. En effet, le ministère de l’Économie et des Finances a récemment annoncé qu’il se pencherait sur la perspective d’une recapitalisation du groupe de transport aérien.

Quelle est la situation du groupe Air France-KLM ?

À l’heure actuelle, la France et les Pays-Bas détiennent respectivement 14,3 % et 14 % du groupe. Le transporteur aérien serait présentement en train de négocier des prêts garantis de six milliards d’euros avec des banques de ses deux actionnaires étatiques, Paris et La Haye, car il risque d’être à court de liquidités sous peu.

HOP! Air France et Transavia, les deux filiales low cost du groupe, ont été contraintes de suspendre l’ensemble de leurs activités. KLM et Air France ont également suspendu la majorité de leurs liaisons — les deux compagnies aériennes n’effectuent principalement que des vols de rapatriement.

Par conséquent, les recettes se font rares. La suspension des vols signifie une perte énorme pour les compagnies aériennes, et ce même si les avions sont cloués au sol. Les charges, telles que les coûts d’entretien et les salaires, restent très élevées.

En quoi consistent les liquidités du groupe ?

Puisque le Groupe est à court de sources pour obtenir des liquidités, il est plus important que jamais pour Air France-KLM de trouver de nouveaux moyens pour renflouer sa trésorerie.

Par conséquent, le 14 mars dernier, le Groupe Air France-KLM a annoncé qu’il avait pu se procurer une ligne de crédit renouvelable de 1,1 milliard d’euros. Il se retrouve ainsi avec plus de 5,5 milliards d’euros de liquidités pour faire face aux conséquences de l’épidémie du Covid-19 et continuer à opérer malgré les nombreuses annulations et interdictions de vols.

Dans un communiqué de presse, le Groupe a expliqué sa situation :

« Le Groupe Air France-KLM annonce avoir tiré sa ligne de crédit renouvelable (revolving credit facility agreement) conclue le 29 avril 2015 et amendée le 6 novembre 2017 pour un montant total de 1,1 milliard d’euros réparti en deux tranches de 550 millions d’euros chacune. Ces tranches sont renouvelables successivement à la demande d’Air France-KLM par période de 1, 3 ou 6 mois jusqu’au 6 novembre 2022.

Le Groupe Air France-KLM dispose donc désormais de plus de 5,5 milliards d’euros de liquidités immediatement disponibles pour faire face aux possibles évolutions du contexte. »

D’ailleurs, afin de dégager des liquidités supplémentaires, le gouvernement français a annoncé le report de plusieurs taxes et redevances aéronautiques pour les compagnies aériennes françaises.

Les frais de personnel ont également été réduits de manière drastique, ce qui a entraîné un gel des embauches et une réduction des dépenses discrétionnaires, telles que les campagnes de promotion et de marketing et le recours à des consultants.

Que signifie le coronavirus pour Air France-KLM ?

Au vu des mesures mises en place au cours des derniers mois, il est clair qu’Air France se bat pour obtenir davantage de liquidités et, par conséquent, éviter la faillite.

Il est toutefois important de mentionner que l’insolvabilité est très peu probable, car la France et les Pays-Bas ont déjà promis des aides d’État.

On ne sait pas encore combien de temps le groupe pourra survivre avec ses propres moyens, mais la pandémie semble durer plus longtemps qu’on ne l’avait prévu, d’où la raison pour laquelle une aide financière de l’État risque de devenir indispensable.

D’ailleurs, le directeur de l’Association internationale du transport aérien (IATA), Alexandre de Juniac, a résumé de manière impressionnante l’étendue de ce phénomène dans une récente déclaration. Selon lui, au vu des développements actuels, la crise coûtera probablement plus de 250 milliards de dollars à l’industrie aérienne et pourrait entraîner la mort massive de compagnies aériennes.

C’est par ailleurs pour cette raison qu’on parle de plus en plus de nationalisation et de nationalisation partielle. Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des Finances, a mentionné qu’il était bel et bien disposé à dégainer l’arme de la nationalisation.

Qu’arriverait-il en cas de nationalisation (partielle) ?

Même si la perspective d’une nationalisation d’Air France-KLM ne semble pas encore tout à fait d’actualité, il faut néanmoins garder ce scénario à l’esprit. Personne ne sait combien de temps durera la pandémie et si les prêts du gouvernement seront suffisants.

En mars, Bruno Le Maire confirmait qu’aucune décision sur ce point ne serait prise sans l’aval préalable des Pays-Bas : « Nous discutons régulièrement avec mon homologue néerlandais […]. Je souhaite que sur Air France, quelles que soient les décisions que nous prendrons, nous le fassions en bonne intelligence. »

En cas de nationalisation, cela signifierait qu’Air France-KLM deviendrait la propriété de la France et des Pays-Bas. On peut se demander dans quelle mesure les approches adoptées par les politiciens seraient mises en œuvre dans un tel scénario et dans quelle mesure une telle démarche aurait un effet positif ou négatif sur les affaires d’Air France-KLM.

Pour l’instant, il n’y a que très peu de bons exemples de nationalisations positives de compagnies aériennes. Trop souvent, les entreprises publiques manquent d’imagination et ne peuvent pas suivre la concurrence en termes de qualité et de prix.

Il ne faut pas oublier que c’est la privatisation des compagnies aériennes qui a permis à l’industrie de prospérer comme elle l’a fait ces dernières années. Les billets sont devenus de plus en plus abordables, ce qui a permis d’établir de nouveaux records de passagers et de générer des profits considérables pour de nombreuses compagnies aériennes.

Qu’arriverait-il si l’État apportait de l’aide financière ?

Bruno Le Maire a précisé que la nationalisation n’était pas la seule option à laquelle le gouvernement pouvait faire appel. Il a déclaré qu’il utiliserait « tous les instruments à [sa] disposition pour protéger notre patrimoine industriel. »

Par conséquent, comme nous l’avons mentionné plus haut, la France et les Pays-Bas se penchent actuellement sur la question d’une aide d’État de six milliards d’euros.

Un tel prêt garanti fait partie des mesures dont dispose Paris pour aider la compagnie à traverser les mois difficiles, en plus des dispositions déjà adoptées permettant le renflouement des coffres.

Selon Les Échos, « à la mi-mars, le groupe disposait de quelque 6 milliards d’euros de trésorerie disponible, l’équivalent d’un peu plus de six mois de besoin de financement. »

Il va donc sans dire que ce prêt garanti apporterait une bouffée d’oxygène à Air France-KLM et lui permettra de rester concurrentiel lorsque la situation sera revenue à la normale.

Qu’arriverait-il si le Groupe ne bénéficiait d’aucune aide ?

Compte tenu de la situation actuelle dans laquelle de nombreuses compagnies aériennes reçoivent des aides d’État, cela pourrait être un désavantage pour Air France-KLM si le groupe en venait à ne pas recevoir d’aide financière. Ce scénario n’est toutefois que très peu probable.

Certaines compagnies aériennes utilisent déjà l’argent de l’État pour rétablir leurs horaires de vol à la normale et remplir les créneaux horaires. Par conséquent, Air France-KLM pourrait prendre du retard avec ces mesures. Dans l’ensemble, cela pourrait donc conduire à un déséquilibre en termes d’équité et de performance dans l’industrie.

C’est ce que l’on constate déjà dans le cas de Singapore Airlines, par exemple, qui a déjà reçu une énorme injection financière, qui devrait également suffire pour son expansion après la crise.

Quelles sont les opportunités pour Air France-KLM ?

L’une des plus grandes opportunités serait de se débarrasser des pôles de l’entreprise qui sont très coûteux, afin de pouvoir travailler plus efficacement et de manière plus rentable. En effet, une nouvelle structure allégée permettrait d’éviter des coûts superflus à l’avenir.

Je ne veux pas aller trop loin, mais je peux imaginer que la crise sanitaire pourrait être une opportunité pour l’ensemble du marché de l’aviation, du moins du point de vue des compagnies aériennes.

En raison de la situation actuelle, il est possible que certaines compagnies aériennes fassent faillite, ce qui pourrait entraîner une consolidation du marché. Il y aurait donc une chance que les prix reviennent à un niveau raisonnable. Cette consolidation et cette réduction de l’offre nous donneraient également la possibilité de pouvoir déterminer les prix dans le meilleur des cas.

D’ailleurs, avec son programme de fidélité Flying Blue, le groupe Air France-KLM dispose d’une clientèle très fidèle, ce qui l’aidera certainement à retrouver rapidement une position établie sur le marché.

… Et les risques ?

Le risque le plus élevé auquel le groupe est actuellement confronté est, en théorie, l’insolvabilité. Toutefois, comme nous l’avons déjà mentionné à plusieurs reprises, l’État finira probablement par intervenir. Par conséquent, la situation ne risque pas de changer.

Un autre risque est que d’autres compagnies aériennes puissent revenir plus rapidement à leur programme de vols initial à la suite d’aides d’État antérieures. Les compagnies aériennes du Groupe ne pourraient ne pas être en mesure de rétablir leur position antérieure sur le marché, par exemple en perdant des lignes et des créneaux horaires ou en étant contraints de licencier des employés productifs.

Les impacts du coronavirus sur le Groupe Air France-KLM en bref

Il est évident pour tout le monde que le Groupe se trouve actuellement dans une phase très difficile. La quasi-totalité de la flotte étant actuellement immobilisée, les ventes continuent de baisser. Un bon nombre de mesures de réduction des coûts a été introduit dans l’entreprise et, malheureusement, il semble que ce sont les employés des compagnies aériennes qui en souffrent le plus.

Il est actuellement absolument impossible de prédire ce que l’avenir nous réserve et à quelle vitesse cette crise sera surmontée, mais je suis toutefois certaine qu’Air France-KLM ne sera pas en situation d’insolvabilité. En tout état de cause, on peut prévoir une année turbulente pour l’aviation.

Je souhaite bonne chance à tous les employés de l’industrie aéronautique et j’espère que la situation se réglera plus rapidement que prévu.

Auteur

Il fut un temps où Max était plus souvent assis dans un avion que dans le tram, alors il a décidé de commencer à écrire pour expliquer à tous comment gagner des miles pour voyager sans se ruiner.

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